« L’intuition est à la connaissance, ce que la canne blanche est à l’aveugle »
Jérome Touzalin
L’intuition est peut être un atout, mais l’apprentissage de la vie est sans doute le meilleur des maîtres.
Être collectionneur depuis plus de 40 ans ou plutôt, au fil du temps, être dans la sauvegarde d’une mémoire, fait aborder les choses autrement, la découverte de l’objet le rend encore autrement plus intéressant.
Et quand en plus la vie – pour revenir à ce dicton qui d’entrée peut surprendre – fait que devant votre chair, votre tout petit bébé on vous assomme de ces mots si percutants: « cécité profonde bilatérale » vous fait voir, (gardons un soupçon d’esprit) les choses différemment, surtout quand avec le temps, votre enfant devient une belle jeune fille malvoyante et non aveugle.
S’il est des parfums aux noms évocateurs qui annoncent la profondeur, la persistance et la résonance de leur singularité, prolongeant la magie de la vie, sans nul doute certains ont été choisis pour un message précis, évident ou peut être un peu moins.
Bon, après cette entrée en matière des plus particulières, abordons dans ce contexte l’un des plus beaux, des plus profonds flacon de la parfumerie française, sur deux aspects qui semblent évidents , et puis un ressenti qui à défaut d’être une évidence, peut aussi détenir un fond de vraisemblance.
1, « L’effleurt » de François Coty à tout jamais a changé la parfumerie française, et l’on peut affirmer que le flacon est devenu plus encore un objet d’art. Est il besoin de rappeler la rencontre de François Spoturno et René Lalique qui, à la demande de ce parfumeur alors peu réputé mais qui voulait « que le Parfum se regarde autant qu’il se sente » va créer un modèle d’étiquette pour le parfum « L’Effleurt ».
D’après ce qu’on en sait l’épreuve sera faite en papier, il la produira ensuite en verre et la collera à chaud sur un flacon en cristal de Baccarat. Ce n’est que quatre ans plus tard ( 1912 ) que René Lalique imaginera son propre modèle pour ce flacon.
On apprend : extrait de Flacon de parfum L’Effleurt, Musée Lalique, et on peut lire ceci : Le graphisme de l’étiquette est alors intégré directement sur le corps du contenant et patiné. Le bouchon, patiné également, est quant à lui orné de deux cigales affrontées. Le visuel créé par René Lalique, typique de l’Art Nouveau, est inspiré du nom L’Effleurt, qui peut faire penser aux termes les fleurs, effluve, ou encore effleurer. Ainsi peut-on y voir une figure féminine aux formes vaporeuses qui semble se répandre telles des effluves parfumées.
2, « L’Effleurt » on comprend, on conçoit que non sans finesse pour un parfum qui ne peut s’en passer, celui ci joue sur les mots de la plus belle des façons.
Car que serait un parfum sans… Les fleurs ?
3, Mais pour « L’Effleurt » son secret pourrait il résider aussi par la texture de son relief au toucher ? Car que ce soit pour les deux exemplaires ( l’un sur un flacon Baccarat, l’autre donc de la cristallerie Lalique ou dans l’une version découverte il y a peu ), on s’aperçoit que tout se joue toujours sur le relief en verre ou de l’étiquette qui peu se lire avec les doigts.. Et vous confiant ceci sans même essayer de vous convaincre, il y a là peut être un petit message subliminal, le secret de ce flacon c’est sans même l’effleurer, sentir que toute sa profondeur peut nous toucher
Car peut être comme le dit Antoine de St Exupery mieux que quiconque :
“On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux.”