A saint Germain des prés

 

“ Parfumez vous où vous voulez être embrassé. “
Coco Chanel

 
Certains affirmeront que cette carte postale n’est pas une carte parfumée, mais n’y a -t-il pas ici comme un air embaumé du désir exalté ?
Il faut imaginer Edith, bercée par le souvenir d’une étreinte qui ne fut peut être que frivole, mais qui fait d’elle une passagère de l’amour.
La voici embarquée, possédée, enlacée dans ses pensées au point d’aller choisir discrètement dans une petite boutique à St Germain des prés, cette messagère colorée, et le cœur brimbalant d’aller la glisser dans la fente d’une boîte aux lettres, semblable à son cœur, éclaboussé de bonheur, où son amant avait su se mettre…
il est écrit au dos :
« Bons souvenirs d’une amie qui pense à vous »

 

Célébrer le printemps

« Pour célébrer le printemps,
Écoutez des fleurs, le chant,
Tous les jardins sont en feux,
Tendez le nez, fermez les yeux »
 
L’essence même du parfum à défaut d’être nostalgique ne peut que plaire aux romantiques, mais est il besoin d’avoir une âme de poète pour trouver du charme aux choses désuètes ?
 
Que penser de ce flacon qui, après plus d’un siècle sans même n’avoir jamais été ouvert nous emmène sans bouger, par le bout du nez ? Le décor de sa boîte d’un raffinement sans égal nous ouvre les allées du désir, celui d’un jardin où les fleurs se jalousent pour nous séduire. Alors en leur honneur un arc en ciel sur terre se pose, et les couleurs qui prennent la pause explosent. En une journée, une heure, un instant la nature s’éveille et le soleil embrase le printemps.
 
Après allez vous étonner que la Maison Vibert Frères fut couronnée lors de l’exposition universelle de 1900 à Paris pour ce type de création avec ces mots immortels : « « Si la fleur a péri, respirons son essence »
Alors quoi de plus délicieuse que cette poésie de Théophile Gauthier pour s’envelopper de ces effluves printaniers, belles journées …
 
Juste un ressenti
André
 
Regardez les branches
Comme elles sont blanches !
Il neige des fleurs.
Riant dans la pluie,
Le soleil essuie
Les saules en pleurs
Et le ciel reflète,
Dans la violette
Ses pures couleurs…
La mouche ouvre l’aile
Et la demoiselle
Aux prunelles d’or,
Au corset de guêpe
Dépliant son crêpe,
A repris l’essor.
L’eau gaîment babille,
Le goujon frétille …
Un printemps encore !
Théophile Gauthier

 

L’Effleurt de Coty

 
« L’intuition est à la connaissance, ce que la canne blanche est à l’aveugle »
Jérome Touzalin
 
L’intuition est peut être un atout, mais l’apprentissage de la vie est sans doute le meilleur des maîtres.
Être collectionneur depuis plus de 40 ans ou plutôt, au fil du temps, être dans la sauvegarde d’une mémoire, fait aborder les choses autrement, la découverte de l’objet le rend encore autrement plus intéressant.
Et quand en plus la vie – pour revenir à ce dicton qui d’entrée peut surprendre – fait que devant votre chair, votre tout petit bébé on vous assomme de ces mots si percutants: « cécité profonde bilatérale » vous fait voir, (gardons un soupçon d’esprit) les choses différemment, surtout quand avec le temps, votre enfant devient une belle jeune fille malvoyante et non aveugle.
S’il est des parfums aux noms évocateurs qui annoncent la profondeur, la persistance et la résonance de leur singularité, prolongeant la magie de la vie, sans nul doute certains ont été choisis pour un message précis, évident ou peut être un peu moins.
Bon, après cette entrée en matière des plus particulières, abordons dans ce contexte l’un des plus beaux, des plus profonds flacon de la parfumerie française, sur deux aspects qui semblent évidents , et puis un ressenti qui à défaut d’être une évidence, peut aussi détenir un fond de vraisemblance.
Peut être une image de parfum
 
1, « L’effleurt » de François Coty à tout jamais a changé la parfumerie française, et l’on peut affirmer que le flacon est devenu plus encore un objet d’art. Est il besoin de rappeler la rencontre de François Spoturno et René Lalique qui, à la demande de ce parfumeur alors peu réputé mais qui voulait « que le Parfum se regarde autant qu’il se sente » va créer un modèle d’étiquette pour le parfum « L’Effleurt ».
D’après ce qu’on en sait l’épreuve sera faite en papier, il la produira ensuite en verre et la collera à chaud sur un flacon en cristal de Baccarat. Ce n’est que quatre ans plus tard ( 1912 ) que René Lalique imaginera son propre modèle pour ce flacon.
On apprend : extrait de Flacon de parfum L’Effleurt, Musée Lalique, et on peut lire ceci : Le graphisme de l’étiquette est alors intégré directement sur le corps du contenant et patiné. Le bouchon, patiné également, est quant à lui orné de deux cigales affrontées. Le visuel créé par René Lalique, typique de l’Art Nouveau, est inspiré du nom L’Effleurt, qui peut faire penser aux termes les fleurs, effluve, ou encore effleurer. Ainsi peut-on y voir une figure féminine aux formes vaporeuses qui semble se répandre telles des effluves parfumées.
 
2, « L’Effleurt » on comprend, on conçoit que non sans finesse pour un parfum qui ne peut s’en passer, celui ci joue sur les mots de la plus belle des façons.
Car que serait un parfum sans… Les fleurs ?
 
3, Mais pour « L’Effleurt » son secret pourrait il résider aussi par la texture de son relief au toucher ? Car que ce soit pour les deux exemplaires ( l’un sur un flacon Baccarat, l’autre donc de la cristallerie Lalique ou dans l’une version découverte il y a peu ), on s’aperçoit que tout se joue toujours sur le relief en verre ou de l’étiquette qui peu se lire avec les doigts.. Et vous confiant ceci sans même essayer de vous convaincre, il y a là peut être un petit message subliminal, le secret de ce flacon c’est sans même l’effleurer, sentir que toute sa profondeur peut nous toucher
 
Car peut être comme le dit Antoine de St Exupery mieux que quiconque :
“On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux.”
 
Juste un ressenti
André
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